octobre 14, 2019 · Non classé

La démonstration la plus intéressante ne débattait pas sur le moyen de retrouver celle-ci, mais pourquoi cette croissance est importante. Au cours des derniers siècles, le niveau de vie n’a cessé de progresser sans interruption – surtout dans le monde occidental. Nombreux sont ceux qui remettent donc en question la thèse selon laquelle nous avons encore un réel besoin de perpétuer cette croissance. Ils relient en fait la « croissance économique » au matérialisme, le nivellement des normes et des valeurs, à la déprédation de la nature. Il y a pourtant là confusion. Certes, sans croissance, nous ne serions pas envahis de centres commerciaux, ni d’embouteillages ou publicité à outrance. Néanmoins il nous serait aussi impossible de jouir de soins de santé, d’enseignement, de culture… C’est grâce à la croissance que nous sommes en mesure aujourd’hui de travailler bien moins longtemps qu’il y a un siècle. C’est aussi la croissance qui a conduit à ce que la mortalité infantile n’a encore jamais été aussi faible, qu’un réseau de transports a pu prendre son essor, que des pays pauvres peuvent produire la scolarité, que la redistribution est réalisable grâce aux impôts sur le revenu. La croissance n’est pas en soi un objectif, elle ouvre plutôt des perspectives. Elle n’est qu’un dispositif permettant à des individus, des entreprises ou des peuples d’améliorer leur sort. Leur manière de gérer cette croissance et d’élaborer leurs priorités participe ensuite de leur choix particuliers. Dans certaines régions du monde comme le Qatar, l’extension de la fortune servira probablement à construire des pistes de ski dans le désert, de magnifiques centres commerciaux ou à la création d’un circuit de Formule 1. La Chine profitera probablement de la prospérité pour racheter des terres labourables étrangères, acheter des vignobles français, mettre sur pied la sécurité sociale ou bâtir des avions de chasse. Un pays comme la Suède décidera de accroître la protection sociale, d’ajouter une période de travail réduite ou de privilégier une meilleure protection des ressources naturelles. Aux États-Unis, une progression de la richesse sera peut-être assignée à la défense et à diminuer les impôts. La croissance n’est donc pas une finalité : ce qui est important, c’est ce que cette croissance permet à la société. C’est le même principe pour les particuliers. Si un individu évolue au niveau des finances, il lui revient de faire ses propres choix. Certains useront de cet argent pour s’acheter plus de produits de consommation ou un plus gros téléphone, pour faire le tour de la planète. D’autres privilégieront l’épargne de leurs enfants et petits-enfants. D’autres choisiront des produits biologiques plus coûteux, appuieront Amnesty International ou appuieront directement les pays du tiers-monde. On peut discuter certains de ces choix. Nous avons peut-être une idée concernant la façon d’user de cette prospérité nouvelle. Cependant pour pouvoir pratiquer ces choix, la croissance est indispensable. Qu’on parle d’une meilleure éducation, de plus de soins de santé, de l’âge de départ à la retraite, de défense, de protection environnementale ou d’une baisse des impôts… Sans croissance, notre société n’a pas les moyens de se développer. Ce séminaire à Biarritz m’a fait pas mal réfléchir.

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